Dans les épisodes précédents, on a vu que la situation des Maoris est nettement meilleure que celle des Aborigènes. Mais ce n'est pas pour autant que tout était pour le mieux dans le meilleur des mondes.

Le début de la débâcle

Les Maoris n'étaient pas nés de la dernière pluie, et ils comprenaient bien ce que les blancs pouvaient leur apporter. Dès l'arrivée des premiers missionnaires et baleiniers, ils ont accepté de permettre aux colons d'occuper certaines de leurs terres, principalement en bord de mer. Cette occupation était autorisée moyennant finances, et les colons ont donc considéré avoir acheté les terres. Puis vint le traité de Waitangi. Les Maoris étaient ouverts à une cohabitation avec les blancs dans le respect des conditions du traité. Les problèmes ont commencé quand les colons ont voulu s'approprier plus de terres.


Un des premiers tracés de Wellington par la New Zealand Company


Les bâteaux arrivaient en masse, emplis d'espoirs d'une vie meilleure et d'une société plus égalitaire. Pour soutenir cet afflux, il fallait trouver aux nouveaux venus un endroit où habiter, et de quoi les nourrir. Acheter les denrées alimentaires aux Maoris ne pouvait marcher que pour un temps, et les colons voulaient leur autonomie alimentaire, donc des terres arables.


Vue de la région de Wellington. Au fond de la baie, la vallée de la Hutt River s'étend, plate, et déjà cultivée par les Maoris.


Entre 1840 et 1865, le seul processus approuvé était le suivant :
* Le gouvernement achète les terres aux Maoris via le "Chief Land Purchase Commissioner"
* Les terres sont revendues aux colons à profit

C'était une manière efficace de remplir les caisses de l'Etat. Dans certains cas, les entreprises de colonisation avaient acheté des terres directement aux tribus avant le traité. Un inspecteur était alors nommé, qui validait la vente et permettait aux entreprises de conserver les terres.

Ce fut le cas par exemple de la New Zealand Company, qui acheta des terres pour fonder Wellington (sud de l'Ile du Nord) et Nelson (nord de l'Ile du Sud) à Te Rauparaha de Ngati Toa. Ils ont par la suite remarqué que des terres au sud est de Nelson, à Wairau, étaient meilleures pour l'agriculture. Cependant, ces terres ne faisaient pas partie de la vente originale. Feignant l'ignorance, la New Zealand Company envoya ses géomètres prévoir des subdivisions et routes. Ngati Toa leur refusa l'accès. Les hommes prirent les armes, et un affrontement violent s'ensuivit. La femme d'un des chefs Maoris fut tuée dans la bataille. Pour la venger, tous les prisonniers blancs furent exécutés. L'inspecteur du gouvernement a ensuite acté en défaveur de la New Zealand Company, confirmant que les terres appartenaient à Ngati Toa.


Carte des zones de combat dans la Hutt Valley en 1846, entre Ngati Toa, leurs protégés, et le gouvernement


Le fond du problème

Dans toutes ces transactions, il y avait un profond malentendu. Pour les Maoris, la terre elle-même ne pouvait être vendue, n'étant pas techniquement la propriété des humains. La transaction avec les blancs, pour eux, consistait plutôt en une location, le début d'une relation d'échanges dans laquelle ils permettaient aux blancs d'utiliser la terre, mais pas non plus d'en faire ce qu'ils voulaient.

Tout ça, c'est très bien, mais c'est seulement maintenant, 150 ans plus tard, qu'on l'a compris (et encore, tout le monde n'est pas vraiment au courant). Cela créa donc nombre frustrations et incompréhensions.

Dans un certain nombre d'autres cas, les "acheteurs" ne signaient pas les "ventes" avec la bonne personne, ou alors ils signaient avec un, alors qu'il en aurait fallu trois, etc.

Dans les années 1850, les Maoris ont dû se rendre à l'évidence. Leurs terres disparaissaient rapidement, et il fallait qu'ils trouvent un moyen de les protéger...